Top 14 analyse CA Brive - ASM Clermont : panne moteur de la voiture n°19

Tout était réuni pour une grande fête du rugby à Brive ce samedi : un stade plein, deux belles équipes et la partie diffusée sur Canal+. Après une belle première sortie, le CAB voulait confirmer contre le voisin clermontois mais cela ne s'est pas passé comme prévu. Brive a tenté mais n'a rien pu faire face au réalisme de l'ASM. Comment en est-on arrivé là et surtout est ce que ce n'est qu'une erreur passagère ?

Brive entamait la rencontre dans le costume de leader du Top 14 et pouvait espérer le conserver après ce derby. Mais pour cela, il fallait vaincre une équipe de Clermont venue s'étalonner en Corrèze. L'étalonnage a été convaincant car l'ASM repart avec la victoire et se replace au sommet du Top 14.

Les points positifs

Après la première journée, Brive se retrouve leader cinq ans après sa dernière apparition à cette hauteur du classement. Le club corrézien préfère travailler dans l'ombre que sous les feux des projecteurs. Même lors de la Pro D2, il était caché derrière le favori d'avant-saison, Lyon, et le leader indiscutable Oyonnax. Le CAB a eu du mal à gérer cette augmentation de la pression médiatique. Maintenant que Toulon, Clermont, Toulouse et le Stade Français occupent les premières places du championnat, Brive retrouve sa tranquillité et son confort de travail. Le chasseur est à nouveau à l'affût de ses nouvelles victimes.

Dans un match assez terne où les équipes ont eu du mal à se lâcher complètement, les rayons de soleil ont été rares surtout du côté corrézien. La défense a tenu le choc face aux vagues successives clermontoises, en n'encaissant à nouveau pas d'essais. Individuellement, Petrus Hauman a fait le boulot dans le jeu aérien mais les principaux rayons de soleil sont venus des ailes du CAB. Pour son premier match de la saison, Malakaï Radikedike a été solide en défense et a apporté en attaque par sa vitesse et sa technique. Son collègue australien a montré une facette peu connue : la défense. Alfie Mafi est plus réputé par son attaque que par sa défense mais son action contre Nalaga sauve un essai et a laissé Brive dans le match. Lancé en bout de ligne à moins de 10 mètres de la terre promise, le fidjien se voyait déjà aplatir mais c'était sans compter sur l’australien qui le plaque aux jambes et le propulse en touche. En attaque, Mafi parvient toujours à déséquilibrer les défenses comme en fin de match samedi. Dommage que le soutien n'est pu aller au bout. Enfin, le public briviste a pu voir à l’œuvre sa dernière pépite : Benito Masilevu. Transfuge du VII, il n'est pas rentré dans les meilleures conditions mais en une action, il a montré ce qu'il sait faire ballon en main et ça promet pour la suite (merci à @saintmtex pour le montage) :

11 742 contre La Rochelle et 13 492 contre Clermont : le public a répondu présent en cette fin août pour assister au match du CAB. L'embellie de la saison dernière se poursuit et Amédée-Domenech n'a plus connu une affluence de moins de 9 000 spectateurs depuis la saison en Pro D2 (nous aurions pu dire 10 000 mais Bayonne et Montpellier ont été en dessous de cette barre). Les deux prochaines affiches ne devraient pas faire baisser cette moyenne, bien au contraire : Toulouse et Toulon. D'ailleurs, la billetterie a ouvert pour la réception du Stade Toulousain, n'hésitez pas à vous procurer un précieux sésame. La saison en Pro D2 a été bénéfique car elle a permis de créer un lien fort entre l'équipe et son public. Il faut que ça continue que ça gagne ou que ça perde (et surtout quand ça perd car c'est dans le dur qu'une équipe a besoin des encouragements de ses supporters).

Les points négatifs

Cela faisait longtemps que ce point fort du CAB n'avait pas connu un tel trou noir. Face à son homologue clermontoise, la conquête briviste a tenu le choc pendant une mi-temps avant de sombrer au retour des vestiaires. Si nous décortiquons la chose, la touche s'en est mieux sortie que la mêlée. L'alignement avait un gros adversaire en face (Chouly, Jacquet, Cudmore) mais le CAB a réussi une bonne première mi-temps avant de connaître des ratés au niveau de l'heure de jeu. Les clermontois ont alors décrypté la touche et marqué de près le capitaine Petrus Hauman. Les anglo-saxons disent "no scrum no win" (pas de mêlée, pas de victoire), après ce match, nous n'allons pas leur donner tort. En première mi-temps, les mêlées ont eu du mal à se stabiliser mais sans que la balance ne penche forcément d'un côté. Cependant, la tendance s'est lourdement inversée en seconde période où le pack auvergnat a concassé son adversaire. Les pénalités sont tombées (au grand bonheur de Camille Lopez), les cartons également (un pour Damien Jourdain à la 66e minute) jusqu'à cette mêlée à la 71e minute qui parachève le travail de sape des avants. En supériorité numérique, la mêlée jaune et bleue emporte son homologue sur 20 mètres. En Corrèze, on se souvient d'une mêlée dominatrice qui offre la pénalité de la victoire à Andy Goode le 15 novembre 2008. Cette mêlée est à ranger sur la même étagère.

Si contre La Rochelle, tous les observateurs avaient trouvé une équipe physiquement au point, ils ont dû relativiser la chose après la partie contre Clermont. Les brivistes ne sont pas apparus au mieux de leur forme, pas forcément à 100%. Fatigués, à court d'énergie au fil du match, les joueurs n'avaient pas le carburant nécessaire pour défier et vaincre une équipe de Clermont encore en rodage mais terriblement efficace. Le CAB comptait sept joueurs qui débutaient leur saison. Certains d'entre eux reviennent de blessure. Il faut que la machine se rode, nous sommes qu'en début de saison mais à surveiller.

Un autre aspect à surveiller également est l'entame de match. C'est le jour et la nuit par rapport à la saison dernière. Il y a un an, Brive attaquait fort ses adversaires (qu'importe le pedigree), les prenait à la gorge et imposait son rythme à la partie. Cette année, c'est le contraire qui se passe. Les brivistes subissent l'entame et les adversaires dictent le rythme de la rencontre. Privés de ballons, les brivistes se mettent en mode défense et attendent que l'orage passe. Pour l'instant, ça plie sans rompre (3-9 à la 30e contre La Rochelle, 6-9 contre Clermont à la mi-temps) mais attention à ne pas jouer avec le feu trop longtemps car la brûlure est proche.

Faute avouée à moitié pardonnée, c'est ça ? Brive a tenté un coup tactique samedi pour contrer Clermont mais d'une part il a échoué et d'autre part Clermont a annihilé la force de frappe briviste. Les entraineurs avaient décidé d'alourdir le pack en mettant Waqaniburotu en 2e ligne (aux côtés de Méla) et le duo Luafutu - Koyamaibole en 3e ligne. Mais comme Toulouse face au Munster la saison dernière, la tactique est retombée comme un flanc. A l'usure, Clermont a pris le dessus et la mobilité a fait le reste. Si l'ASM a su contourner le coup tactique des brivistes, elle a également retenu les leçons de la saison dernière. En montant à deux (ou trois) sur Koyamaibole, les clermontois ont stoppé le bulldozer corrézien. Il n'a pu attaquer la zone de Lopez contre lequel il s'était régalé lors de la réception de Perpignan. Kolelishvili a abattu un boulot énorme en défense et s'est très souvent retrouvé sur la route du colosse fidjien. Bloqué dans "la cage", Dominiko Waqaniburotu n'a pu son rayonnement habituel et Poutasi Luafutu, en manque de rythme, est lui aussi tombé sur les sécateurs auvergnats. En bloquant le pack briviste, Clermont a fait un grand pas vers la victoire. Brive devra se servir de cet épisode pour trouver des solutions de repli au cas où le plan A ne marche pas.

Pris en tenaille par la défense clermontoise, Koyamaibole n'a pas eu son impact habituel

En conclusion

Au début du match, le public briviste ne s'attendait pas à vivre un tel scénario de rencontre. Et pourtant, Clermont a su parfaitement faire déjouer le CAB qui, à court d'énergie et de solutions, n'a pas réussi à prendre à défaut la défense clermontoise. Bénéficiant de l'indiscipline briviste, Clermont a enchainé les pénalités pour s'offrir la victoire dans le derby. Dans un jour sans, Brive doit réagir le week-end prochain à Lyon qui est un concurrent direct pour le maintien.

Article rédigé par Rémi Brazon